L'héritage est souvent une question épineuse qui peut parfois déchaîner les passions. C'est pour cette raison qu'il est important de bien connaître les règles successorales avant d'être confronté à cette situation. En particulier si vous disposez d'un patrimoine immobilier qui peut faire l'objet de désaccords voire de conflits à votre décès.
Vos enfants sont toujours prioritaires...
Vos enfants reçoivent toujours de façon prioritaire l'héritage par rapport aux autres membres de la famille. Cette règle s'applique même si vous avez rédigé un testament qui va dans le sens contraire. En effet, la loi fixe des limites pour protéger certains héritiers qu'il n'est pas possible de déshériter. On les appelle les "héritiers réservataires".
À ce titre, vos enfants disposent d'une réserve qui est égale à :
- la moitié de la succession si vous avez un enfant
- Les deux tiers de la succession si vous avez deux enfants
- Les trois quarts de la succession si vous avez trois enfants ou plus
Il est important de préciser qu'un testament qui ne respecterait pas ces limites pourrait être contesté par les héritiers lésés.
Par ailleurs, il existe une option intéressante à connaître : vos enfants peuvent renoncer à leur héritage au profit de leurs propres enfants. Cette situation s'applique de fait si les enfants sont morts au moment de la succession. Les petits-enfants viennent en "représentation" de leur père ou de leur mère.
... Mais partage l'héritage avec l'époux survivant
Dans le cas où vous êtes marié, l'époux survivant reçoit toujours une part de la succession. Comme vos enfants, il dispose également d'une réserve assurée par la loi.
Il peut choisir entre deux options :
- Option 1 : La pleine propriété du quart de la succession
- Option 2 : La totalité de la succession en usufruit
Vos enfants perçoivent le reste :
- Option 1 : La pleine propriété des 3/4 de la succession
- Option 2 : La nue-propriété de l'intégralité de la succession
Il est important de préciser, qu'en présence d'enfants d'une précédente union, le conjoint hérite du quart des biens en pleine propriété (option 1) , sans possibilité d'opter pour l'usufruit (option 2).
Quelle est la meilleure option quand il est possible de choisir ?
- L'option 1 est souvent choisie par les héritiers car elle réduit la fiscalité sur la succession. Cependant, si vous disposez d'un patrimoine immobilier, les héritiers se retrouvent en situation d'indivision. C’est-à-dire qu'ils vont, en quelque sorte, se retrouver "copropriétaires" des mêmes biens immobiliers. Cette situation est souvent source de conflits si les intérêts des héritiers ne sont pas alignés.
Un exemple concret :
Madame Dupont hérite d'un appartement à Lyon suite au décès de son mari. Elle a deux enfants. Elle opte pour la pleine propriété des 3/4 de la succession. Elle se retrouve en indivision avec ses deux enfants. Madame Dupont souhaite continuer à vivre dans son logement. Ses enfants veulent le vendre pour des raisons financières. Madame Dupont est protégée par la loi et peut continuer à y demeurer pendant toute sa vie. Ses enfants ne peuvent pas revendre l'appartement et se retrouvent perdants. Cette situation peut alimenter des tensions familiales.
- L'option 2 présente comme principal intérêt d'éviter la situation d'indivision en privilégiant le démembrement. C’est-à-dire que les héritiers vont disposer de droits de propriété différents sur les mêmes biens immobiliers.
Reprenons notre exemple précédent :
Madame Dupont opte cette fois pour l'usufruit de la totalité de la succession. Ses enfants vont ainsi recevoir la nue-propriété de l'appartement de Lyon. Madame Dupont, conformément à son souhait, peut continuer à vivre dans son logement. Ses enfants peuvent revendre la nue-propriété de l'appartement à un investisseur afin d'obtenir rapidement des liquidités sans léser leur mère qui pourra toujours y vivre (en tant qu'usufruitière). Cette solution permet à chaque partie de sortir gagnante.
Cette deuxième option semble préférable si votre succession contient des biens immobiliers et que vous souhaitez plus de souplesse dans la façon de disposer de votre patrimoine.
Il est important de préciser qu'en l'absence d'enfant, le conjoint survivant hérite :
- de la totalité de la succession si les parents du défunt sont morts
- de la moitié de la succession si les parents du défunt sont en vie
- des 3/4 de la succession si l'un des deux parents du défunt est en vie
Qui hérite s'il n'y a ni enfant ni époux survivant ?
Il existe 4 ordres d'héritiers :
- Héritiers du 1er ordre : les enfants et leur descendance
- Héritiers du 2ème ordre : les père et mère, les frères et sœur et les descendants de ces derniers (par exemple les neveux et nièces)
- Héritiers du 3ème ordre : les ascendants autres que les parents (les grands-parents par exemple)
- Héritiers du 4ème ordre : les collatéraux autres que les frères et sœurs et les descendants de ces derniers (oncles, tantes, cousins...)
Chacune de ces quatre catégories exclut la suivante. Par exemple, en l'absence d'héritiers du 1er ordre, ceux du 2ème l'emportent sur ceux du 3ème et du 4ème ordre.
Il est important de préciser la situation dans laquelle vous ne seriez pas marié et vous n'auriez pas d'enfant :
- Chaque parent reçoit le quart de la succession
- Vos frères et sœurs reçoivent la moitié restante ou les 3/4 si un seul parent est en vie.
À savoir que les concubins et les partenaires de pacs n'héritent pas à moins d'être désignés dans un testament.
Dernière possibilité : si vous n'avez aucun héritier, la succession est considérée comme étant en "déshérence" et c'est l'Etat qui la récupère.
Est-il légalement possible de déshériter ?
Vous avez le droit de disposer de la part qui vous revient en dehors de la réserve légale assurée pour les héritiers protégés par la loi.
Un exemple concret :
Madame Dupont souhaite transmettre une partie de son héritage à l'un de ses neveux. Sachant qu'elle a deux enfants, elle ne pourra léguer par testament qu'un seul tiers de son héritage à son neveu.
Quelles sont les solutions légales pour déshériter totalement vos héritiers réservataires ?
Le droit français est particulièrement protecteur. Vous n'avez, en réalité, que trois possibilités :
- Disposer d'une partie de votre patrimoine à l'étranger et réaliser un montage avec des notaires et avocats spécialisés en droit successoral international. Attention tout de même à cette option qui peut coûter cher et être contestée par les juges français.
- Exclure un héritier réservataire pour indignité : il s'agit d'un cas très limité dans lequel l'un de vos héritiers aurait exercé des violences physiques ou psychologiques à votre encontre...
- Vendre en viager : cette solution permet de conserver l'usage de votre bien immobilier tout en cédant la nue-propriété à un investisseur. À votre décès, l'acquéreur récupère la propriété du bien que vous avez vendu excluant ainsi vos héritiers. Si vous choisissez des rentes viagères élevées plutôt qu'un bouquet, vous pouvez d'autant plus limiter votre héritage en réduisant les liquidités disponibles à votre mort.